Aujourd’hui, je présente David Pascaud : un auteur
O.B : Bonjour David Pascaud, pouvez-vous en quelques mots vous présenter. Quel est votre parcours, que faisiez-vous avant d’écrire ?
D.P : Avant d’écrire, je ne sais plus… car il me semble que je le fais depuis toujours. Mais c’est vrai que j’ai longtemps attendu avant de me lancer dans la publication de mes écrits.
J’enseigne l’histoire et la géographie dans la région de Poitiers, et j’ai travaillé en parallèle pendant une dizaine d’années dans l’édition comme correcteur et enquêteur/rédacteur pour des guides comme Le Petit Futé et Le Pictavien. C’était un moyen de mettre du beurre dans les épinards à une époque où mon statut de prof maître-auxiliaire était précaire, mais aussi un excellent apprentissage à une écriture précise et incisive.
O.B : Au plus loin que vous vous souvenez, depuis quand écrivez-vous et quel(s) type(s) de livre(s) écrivez-vous ?
D.P : Ado, je griffonnais tout un tas de textes courts, pas mal de poèmes en rime ou en prose. La plupart n’ont pas très bien vieilli… ou disons plutôt qu’ils sont restés très « jeunes ». Mais il faut bien un début. Dans les années 90, le virus s’est amplifié avec des carnets de voyages et mes premiers récits, plutôt des nouvelles ou des novellas, comme on dirait maintenant, c’est-à-dire un format intermédiaire entre la nouvelle et le roman. C’est en 2003 que je me suis lancé dans l’écriture d’un premier véritable roman : Araldus. Il me trottait dans la tête depuis longtemps. Maître-auxiliaire dans l’Education nationale, j’avais peu d’heures de classe à cette époque et je m’occupais essentiellement de mon fils en bas âge. J’ai écrit le livre sur une année scolaire, de septembre à mai, en m’efforçant de respecter une moyenne d’une demi-page par jour, en jonglant avec les biberons et les couches à changer. La littérature c’est aussi du quotidien… Dix mois d’écriture, de recherches en bibliothèque, de repérages sur le terrain ont été nécessaires pour raconter la vie de ce personnage, fondateur présumé de la ville de Châtellerault, à l’époque carolingienne. Ensuite, le roman a dormi dans un fichier informatique pendant une décennie. C’est à cette époque que j’ai beaucoup travaillé dans l’édition touristique et participé à l’élaboration d’un livre avec le photographe Dominique Bordier : Poitiers en cent photos insolites. Une autre forme d’écriture, à la fois ludique et informative. En janvier 2015, Jean-François Pissard m’a relancé avec Araldus, l’a lu et m’a proposé de le publier en version e-book. Une sorte de déclic. Je peux dire que Jean-François m’a mis le pied à l’étrier.
Avec Araldus, on m’a catalogué parmi les auteurs régionaux de romans historiques. Ce n’est pas gênant car l’histoire humaine, individuelle et collective, et l’obsession du temps qui passe sont très présents dans ce que j’écris. Mais c’est faux en partie, trop réducteur. Je ne me confine pas à un registre. Les récits de Valises, par exemple, sont différents d’Araldus.
O.B : Alors, quels sont les titres de vos derniers livres ?
D.P : Le tout dernier livre paru est un recueil de nouvelles intitulée Valises, sorti en janvier 2018 aux éditions toulousaines du Carnet à Spirale. Je suis également partie prenante au livre-CD Des Livres et nous des chansons réalisé par Les Ducs pour qui j’ai écrit une des 7 nouvelles (chacune étant liée à une des 7 chansons du groupe). Quant au roman « médiéval et moderne » Araldus, il est toujours disponible dans sa version numérique.
O.B : Pouvez-vous nous parler de votre dernier ouvrage ?
D.P : Valises regroupe 12 nouvelles, apparemment très différentes dans leur style d’écriture, leur longueur, leur thème et leur genre. La valise est un objet symbolique dans lequel chacun/e – personnages, lecteurs etc - met ce qu’il veut ou peut. Les récits sont souvent inquiétants, lorgnant parfois vers le fantastique, voire le thriller, d’autres sont plus poétiques, toujours saupoudrés d’une atmosphère douce-amère avec des individus en clair-obscur, déroutants, à la limite de la folie. Je promène le lecteur d’une histoire de sorcière dans le Poitou du XVIIe à la Russie post-communiste des années 90. On s’immerge aussi bien dans l’univers mental d’un collabo antisémite sous l’Occupation, d’un migrant africain sans papier que d’une femme âgée bouleversée par ses désirs intimes. Il y a des fils conducteurs d’un texte à l’autre, mais la subjectivité de chaque lecteur/lectrice est mise à contribution.
O.B : En Définitive, quels sont les sujets qui vous inspirent ?
D.P : L’humain, simplement l’humain. Ses doutes, ses peurs, ses espoirs. Le sujet est infini. Universel et renouvelable sans cesse !
O.B : Quel est le conseil le plus important que vous avez reçu pour écrire ou dans un autre domaine ?
D.P : Pendant une de mes lectures d’adolescent, une phrase m’a marqué chez Bernardin de Saint-Pierre, dans son Paul et Virginie : « Si le monde est ton ennemi, sois à toi-même ton ami. » Et un véritable ami est exigeant… Je suis donc resté intraitable avec moi-même, sans aucune complaisance avec ce que j’écris.
O.B : Les lecteurs s’interrogent souvent sur la méthode des auteurs pour écrire. Avez-vous une technique précise ou est-ce l’inspiration qui vous guide dans la construction de vos intrigues et de vos personnages ?
D.P : Pendant longtemps je me suis imposé des séances d’écriture : un thème précis ou une phrase donnée, par une autre personne, et un temps déterminé, en heures et ou jours pour terminer le texte. Cela me permettait d’ordonner les idées, de canaliser les mots, de charpenter mes récits. Avec l’âge, je pense, un peu orgueilleusement peut-être, que je n’ai plus besoin de ces cadrages et je cherche plus de liberté. De plus en plus, je me laisse guider par le hasard, celui des rencontres, des situations de la vie. Je prends beaucoup de notes, des bribes de phrases qui peuvent faire sens, des sortes d’aphorismes instantanés, de haïkus instinctifs, ou qui sonnent bien à l’oreille car la musicalité des mots comptent beaucoup.
O.B : Travaillez-vous sur un nouveau projet et si oui, sans nous dévoiler l’intrigue, quel en est le thème ?
D.P : Plusieurs projets se chevauchent. Un roman d’anticipation, en bêta-lecture pendant l’été, qui se situe dans une inquiétante Pologne des années 2050 et une écriture à quatre main avec Marie-Cécile Fourès, éditrice de la Spirale, pour un chassé-croisé pas forcément amoureux entre un homme et une femme… et c’est moi qui raconte le personnage féminin tandis que Marie-Cécile s’occupe du personnage masculin. Quant à la nouvelle du livre-CD des Ducs, intitulée Grands-pères, un vaste sujet là encore, elle va très probablement s’étoffer et devenir un roman…
O.B : Comment faites-vous connaître et qu’attendez-vous de vos lecteurs ? Comment allez-vous à leur rencontre ?
D.P : Les réseaux sociaux, quoi qu’on en pense, sont un moyen de parler de son actualité et de rencontrer un public quand on débute et que l’on n’est pas intégré à d’autres réseaux de connaissances. Mais cette communication joue sur l’immédiateté et se noie dans le flot des infos. Autre problème des réseaux sociaux : le nivellement. En apparence, tout se vaut, le livre génial et le bouquin écrit avec les pieds. J’y ai cependant fait des rencontres formidables avec de vrais amoureux des Lettres et quelques analystes fins et pertinents. Je pense à Thierry Bellaiche avec son blog Impromptus dont chaque texte est un joyau d’observation de l’âme humaine, où se mêlent humour noir, érudition et auto-ironie.
Bien sûr, un article dans les médias traditionnels a plus de poids qu’une multiplication de publications sur les réseaux que je qualifie ironiquement d’asociaux où tout s’oublie vite. Mais la presse locale ne court pas après les auteurs pour parler d’eux. Il y a aussi les salons qui restent des moments privilégiés, ancrés dans le réel. J’apprécie également les rencontres-dédicaces qui se font hélas trop rares : la majorité des libraires et des bibliothèques sont frileux à l’idée de faire intervenir un auteur. Je me suis parfois confronté à des refus très… méprisants. A se demander si certains de ces professionnels de la profession apprécient vraiment les livres.
O.B : Justement, allez-vous participer prochainement à un évènement littéraire ?
D.P : Je participe cet été à plusieurs manifestations littéraires comme les salons « Arbalivres » à Arbas (31) et « En ces lieux des Livres » à Loudun (86). J‘aime beaucoup le concept de ce dernier avec une dispersion des auteurs exposants dans toute la vieille ville, dans la rue ou chez l’habitant. Un autre salon généraliste, organisé par PictaBook 86, se profile à l’automne à Vouneuil-sous-Biard…
O.B : Comment appréhendez-vous le monde de l’édition d’aujourd’hui ?
D.P : Je n’ai pas de plan de carrière. J’écris plus par addiction que par passion. Ce dernier terme m’agace car il est creux et il ne veut pas dire grand-chose. La partie éditoriale vient après. Je sais que beaucoup d’auteurs pensent déjà à l’édition avant l’écriture. Ils cherchent l’idée qui va plaire. Moi non, je ne parviens pas à me mettre dans cet état d’esprit. C’est la différence entre « faire » et « écrire » un livre. J’écris ce qui me vient, me plait, me démange ou me dérange, et non pas ce que nécessairement les maisons d’éditions attendent. Il existe heureusement une foule d’éditeurs, souvent également auteurs et à priori créatifs, avec lesquels une complicité s’établit. J’ai eu cette chance avec Jeff Pissard, des éditions numériques Jerkbook, et Marie-Cécile Fourès de la Spirale.
L’auto-édition me tente également mais cela nécessiterait de dégager du temps.
O.B : David, avez-vous des auteurs fétiches ?
D.P : Je suis ouvert à des registres et des styles différents. Je lis rarement deux livres de suite d’un même auteur. Certaines lectures font l’effet d’une bonne claque revigorante. Elles ont eu une influence durable sur ma façon de concevoir l’écriture : ça a été le cas avec Maupassant dès le collège, puis Barjavel, et plus tard Zweig, Joyce, Borges, Umberto Eco ou plus récemment Alan Moore (roman graphique), etc. On trouve aussi des perles parmi les auteurs indépendants, comme Didier Betmalle et Selma Bodwinger, experts dans l’art de la nouvelle bien ciselée.
O.B : Que lisez-vous en ce moment ?
D. P : Des nouvelles de Paul Faye, parue chez José Corti, et Le Livre de Joe de Jonathan Tropper. Mais il y a pas mal d’autres ouvrages sur liste d’attente…
O.B : Une question essentielle : où peut-on se procurer vos livres et où peut-on suivre votre actualité ?
D.P : Valises peut être commandée dans toutes les librairies de France et de Francophonie. Le livre-CD des Ducs accompagne le groupe dans ses tournées : il est possible de l’acheter après chaque concert. Araldus est téléchargeable sur de nombreuses plateformes de vente en numérique. Le livre existe aussi en format broché, exposé lors des salons.
O.B : Merci David Pascaud d’avoir accepté de participer à cette interview qui va permettre aux lecteurs de mieux vous connaitre.
Copyright Olivier Blochet - juillet 2018
Interview réalisée le 11 juillet 2018
Sites importants :
< David Pascaud :
https://david-pascaud.iggybook.com/fr/
< Editions du Carnet à Spirale :
https://editionsducarnetaspirale.com
editionsducarnetaspirale.com/valises-de-david-pascaud-collection-nouvelles/
< Editions Jerkbook :
http://www.editions-jerkbook.com
< Site officiel Les Ducs
http://www.lesducs.net